Où ?
Située sur la rivière Fiddich, la petite ville de Dufftown (1 500 habitants) occupe une position centrale dans le Speyside. Avec six distilleries importantes en activité (dont Glenfiddich et Balvenie, excusez du peu…) et deux autres fermées (Convalmore et Pittyvaich) mais dont les malts sont encore disponibles, elle a pu se baptiser Malt Whisky Capital of Scotland sans faire broncher d’autres villes écossaises pourtant bien pourvues comme Rothes, Elgin ou Keith.
Quand ?
Portant le même nom que la ville où elle se trouve (sans être la plus ancienne…), la distillerie a été créée en 1895 par un groupe d’industriels originaires notamment de Liverpool. Reprenant les bâtiments d’un ancien moulin situé sur la rivière Dullan, elle a commencé à produire en 1896. Elle connaît ensuite une existence sans histoire, vouée à la production de malts pour les blenders. Sa capacité augmente régulièrement. Les alambics, au nombre de deux au démarrage, passent à quatre en 1968 et à six en 1974. Le maltage sur aire, lui, a été abandonné dès 1968.
Qui ?
Peter Mackenzie, un des associés fondateurs de Dufftown, en est devenu le propriétaire en 1897, alors qu’il possédait également la distillerie Blair Athol. Avec son rachat en 1933 par la société Athur Bell’s, Dufftown devient un des piliers du principal groupe de production de scotch whisky, qui s’est appelé successivement United Distillers (appartenant à Guinness), puis UDV et en 1985 Diageo, premier groupe mondial de spiritueux.
Comment ?
Equipée d’une cuve de brassage de 13 tonnes (la plus importante d’Écosse), de 12 fermenteurs en inox et de trois paires d’alambics, la distillerie a été longtemps la plus importante en capacité de Diageo, et n’a été récemment « dépassée » que par Roseisle et Caol Ila. Elle produit en effet actuellement 6 millions de litres d’alcool par an, en travaillant 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. Le malt doit ses arômes spécifiques à plusieurs caractéristiques : longue durée de fermentation (au moins 75 heures), distillation lente, faible remplissage des alambics entraînant un contact accru avec le cuivre. Par ailleurs, une partie des fûts utilisés ont contenu du xérès.
Le site possède également un atelier d’évaporation des résidus de distillation, transformés en un sirop compact, qui est ensuite traité biologiquement pour séparer les parcelles métalliques (du cuivre surtout) des autres effluents, qui peuvent alors retourner à la nature.
Quoi ?
Longtemps, il n’y a eu aucun embouteillage des malts de Dufftown, toute la production servant à l’élaboration des blends de Diageo, principalement Bell’s. Puis est apparu un 15 ans d’âge vers 1995, en très faible quantité.
En 2006, Diageo lance de façon plus massive The Singleton of Dufftown, un 12 ans d’âge, rapidement suivi par un 15 ans et un 18 ans. Mais le choix du nom « Singleton », qui apparaît en gros sur l’étiquette et dans les annonces publicitaires, est source de confusion. Car ce nom (utilisé dans l’industrie pour désigner un patron unique, ou encore au bridge pour qualifier une main de quatre cartes de chaque couleur) est employé également par Diageo pour des single malts en provenance d’autres de ses distilleries : Auchroisk, Glendullan et Glen Ord ! Certes, ils sont en principe réservés à des marchés spécifiques, à savoir Dufftown pour l’Europe, Glendullan pour les Etats-Unis et Glen Ord pour l’Asie, mais c’est parfois plus confus, notamment dans le réseau des duty free. Et il faut bien lire l’étiquette, car le nom d’origine de chaque distillerie est écrit bien plus petit que celui de Singleton !
Ronds et chaleureux, les malts de Dufftown sont très représentatifs du Speyside, avec ce qu’il faut de puissance mais sans excès, et sont donc accessibles au plus grand nombre sans pouvoir choquer quiconque. Outre les trois versions principales, ont été commercialisées plus récemment encore des Singleton (sans mention d’âge) pour le réseau Duty Free, baptisés Unité et Trinité, ainsi qu’un 28 ans en brut de fût (52,3°), le premier officiel.
On trouve encore, mais vraiment rarement, quelques embouteillages indépendants, sous le nom Dufftown ou encore Dufftown-Glenlivet.
Gilbert DELOS