Où ?
Tobermory est la ville principale de l’île de Mull, à l’ouest de l’Ecosse, la deuxième des Hébrides en superficie après Skye. Elle est située tout au nord de l’île, et son accès par la route n’est guère facile. Bien que la terre soit fertile (notamment pour la culture de l’orge), elle n’a jamais été vraiment exploitée, les habitants préférant récolter les algues utilisées par les verreries et les savonneries. Certes, il y a eu des distillateurs clandestins, mais bien peu ont donné naissance à de véritables distilleries, d’autant qu’il fallait faire venir l’orge par la mer.
Quand ?
Seule distillerie officielle dans toute l’histoire de l’île de Mull, Tobermory a été mis en service en 1823 par John Sinclair, dans des locaux ayant servis à une brasserie connue depuis au moins 1798. Sinclair était un commerçant fortuné grâce à ses bateaux et ses activités dans la transformation du varech. Mais ses efforts ne furent pas couronnés de succès, et la distillerie s’est arrêtée de produire en 1837… jusqu’en 1878, date de son rachat par le groupe DCL (aujourd’hui Diageo). Elle fut maintenue en activité jusqu’en 1928, pour connaître une nouvelle période de fermeture qui a duré jusqu’en 1972, date de sa reprise par un consortium… qui ne réussit pas à la rendre profitable. Après une période un peu confuse, marquée par la vente des malts de Tobermory en vatted malts… la distillerie est finalement reprise solidement en mains en 1993 par le groupe Burn Stewart, qui relance la production. Devenu filiale du groupe Angostura, l’avenir de la distillerie semble aujourd’hui beaucoup plus serein.
Qui ?
Mis à part les Stevensons, des industriels venus d’Oban qui ont beaucoup contribué au développement de la ville de Tobermory, et John Sinclair, le négociant audacieux qui a créé la distillerie, l’histoire n’a pas retenu les noms de ceux qui ont contribué à la vie de la distillerie au cours de sa longue histoire.
Comment ?
Malgré la fertilité de l’île de Mull, tout le malt (tourbé et non tourbé) utilisé ici est importé par bateaux, principalement de Port-Ellen, sur Islay.
La grande originalité de la distillerie réside dans ses alambics, de grande taille, et surtout pourvus de cols-de-cygne qui sont courbés à 90° avant de repartir à l’horizontal vers les condenseurs. Cette forme particulière expliquerait la grande finesse des eaux-de-vie, plus légères car débarrassées des éléments non-alcool les plus rudes.
Quoi ?
Cas rare en Ecosse, la distillerie produit aujourd’hui deux single malts différents avec les mêmes installations :
– le Tobermory, souple, moelleux et proche d’un Speyside
– le Ledaig, très fortement tourbé, avec des notes végétales d’une grande originalité.
Il faut savoir que Ledaig est le nom d’origine de la ville de Tobermory, d’où cette double dénomination.
Le problème, pour l’amateur de malts anciens, c’est que cette répartition entre le Tobermory non tourbé et le Ledaig tourbé n’a pas toujours été en vigueur dans le passé, avec des confusions possibles entre tourbé et non tourbé. Mais ces anciennes éditions étant de plus en plus rares, le risque est nettement moindre aujourd’hui.
Ledaig a pu souffrir aussi d’une comparaison injuste avec les malts tourbés d’Islay. Certes, il ne présente pas leur caractère fumé et phénolique, mais l’expression de la tourbe végétale qu’il apporte est suffisamment rare pour intéresser les vrais amateurs.
Hormis les versions officielles (10 ans pour Tobermory et 7 ans pour Ledaig), les deux malts sont assez rares chez les embouteilleurs indépendants, avec parfois des versions maturées en fûts de xérès. Les deux malts sont désormais non filtrés à froid et embouteillés à 46,3°.