Comme pour un vin ou toute autre boisson, la dégustation d’un single malt met en jeu nos principaux sens, à savoir la vue, l’odorat et le goût, ainsi que le toucher, notamment pour en apprécier la texture. Mais, compte-tenu de la spécificité du whisky, il nécessite des critères et un vocabulaire particulier.
En introduction, il est bon de souligner quelques-unes des conditions nécessaires au bon déroule-ment d’une dégustation.
La notion la plus importante, c’est que cette opération est éminemment subjective. Elle repose d’abord sur les sens particuliers et l’expérience du dégustateur. S’il y a bien sûr des caractéristiques propres à un malt que chacun peut découvrir et retrouver, la synthèse finale est propre à chaque dégustateur. Après avoir analysé un malt avec chacun de ses sens, lui seul pourra dire s’il lui plaît ou non, selon ses propres critères, et surtout le plaisir qu’il y aura pris.
C’est pourquoi, tout particulièrement pour les dégustateurs débutants, il ne faut jamais se laisser impressionner par les commentaires des autres participants plus chevronnés. Ils peuvent apporter une aide, en aucun cas ils ne doivent être acceptés tels quels. La remarque pleine d’humilité la plus couramment entendue lors de réunions de dégustation : «je ne suis pas doué, je ne sais pas quoi dire, je ne connais pas les mots corrects» pourrait être louable, elle est en fait à proscrire.
Car chaque individu, depuis sa naissance, reçoit des messages par ses différents sens. Dans une dégustation, il s’agit simplement de faire appel à sa mémoire, en essayant d’identifier les informations visuelles, olfactives et gustatives que nous envoi l’échantillon proposé.
Il n’existe pas de «don» pour la dégustation, dont certains seraient pourvus dès leur naissance, et d’autres privés pour toujours. Tout au contraire, il s’agit d’un apprentissage et d’un perfectionnement qui pourront être permanents.
Sur le plan pratique
Compte-tenu du caractère éminemment subjectif de la dégustation, certaines conditions la favorisent, alors que d’autres la contrarient, voire la rendent impossible.
Tout d’abord, il vaut mieux être à jeun, soit en fin de matinée, soit en fin d’après-midi, lorsque l’organisme commence à être en appétit. A ce stade, nos sens sont plus aiguisés et plus attentifs !
Ensuite, faire attention à son humeur. S’il est irrité ou fatigué, après une longue journée de travail ou un voyage éprouvant, le dégustateur sera moins ouvert et moins disponible pour percevoir les informations spécifiques que lui apportera un malt, aussi exceptionnel soit-il. Être détendu, relaxé constitue toujours une condition appréciable à la réussite d’une dégustation. Quelques exercices de respiration, c’est-à-dire d’oxygénation accrue de l’organisme, sont également salutaires. Bien évidemment, le fait d’avoir un rhume ou une bronchite sont rédhibitoires !
Enfin, pour pouvoir se concentrer, la pièce où se déroule la dégustation doit être claire, aérée, à température tempérée, et la plus calme possible. Difficile en effet dans un brouhaha de conversations de bien percevoir les caractéristiques d’un malt.
Le verre doit être propre et net, sans poussière ni traces de doigt. En cas de doute, ne pas hésiter à le rincer avec un peu d’eau fraîche. L’eau est d’ailleurs appelée à jouer un rôle important dans la suite des opérations, notamment pour atténuer si nécessaire la puissance de l’alcool, et pour se rincer la bouche entre deux malts différents, afin d’éviter que l’un interfère sur l’autre.
Au cours d’une même séance, le nombre de malts à déguster ne doit pas dépasser quatre ou cinq, surtout en raison de la saturation rapide des papilles et des récepteurs olfactifs. Cette saturation intervient d’autant plus vite que le degré d’alcool est élevé (notamment avec les bruts de fût) et devient agressif pour les sens, qui ont du coup tendance à se bloquer.
Enfin, tout en faisant attention à ce qui se passe, la dégustation ne doit pas être vécue comme une épreuve intimidante ou austère, mais constituer une source de plaisir et de bien-être, surtout si les malts soumis à l’examen sont de bonne qualité (ce qui est toujours le cas au Clan, bien entendu). C’est pourquoi le partage des impressions sensorielles est un moment important : il ne s’agit pas d’un contrôle des connaissances, mais avant tout d’un échange entre tous les participants pour comparer leurs impressions, dire le bien ou le mal qu’ils pensent du malt en question, en étant attentif à ce que les autres ont pu trouver comme notes aromatiques ou gustatives particulières.
C’est aussi comme cela que se développe le plaisir de la dégustation : partager entre amis la découverte d’un grand malt, fruit d’années de travail et de patience.