BRUICHLADDICH OU « LE BORD DE LA COTE »

Si vous avez la chance un jour d’aborder l’île d’Islay par le loch Indall, qui tranche presque l’île en deux, et que lentement le ferry s’approchera de l’embarcadère de Port Ellen, vous pourrez, là en face, un peu en retrait de la grève balayée par le vent salé et l’air iodé, deviner Bruichladdich la belle du loch. (Pour imiter la prononciation locale nous dirons « Brewick laddie »).

Ses bâtiments brossés de blanc comme toutes les distilleries de l’île se dévoilent au détour de la route venant de Port Charlotte. Là, dans d’anciens entrepôts de la distillerie Lochindaal sommeillent encore de nombreux fûts de la distillerie, richesse du passé et promesse pour l’avenir. Là où la terre et la mer se mêlent intimement, ces fûts respireront pour un temps les embruns et les algues, et dans une secrète alchimie transmettrons un jour à nos sens les effluves de l’île.

Le 11 octobre dernier, Jim Mc Ewan nous faisait l’honneur d’être notre invité lors de notre soirée de gala et d’être l’ambassadeur de la distillerie Bruichladdich, et chacun pu tout au long de la soirée mesurer sa générosité, admirer son expertise, et apprécier sa personnalité.

Jim est un Ileach pur jus, il est né sur Islay, il fut, adolescent, apprenti tonnelier dans l’une des distillerie de l’île, puis fit son apprentissage en tout ce qui concerne l’élaboration du whisky, et c’est le plus naturellement qui devint master distiller chez Bowmore pendant de très nombreuses années. Autrement dit rien de ce qui concerne la magie de ce breuvage ne lui est étranger ! Infatigable laudateur de son île, de cette nature sauvage encore pour un temps préservée, et de ses whiskies dans leur infinie complexité, il défend maintenant avec énergie les couleurs de Bruichladdich, associé incontournable de Mark Reynier en assurant la direction de la production.

Comme souvent en Ecosse, l’histoire de la distillerie Bruichladdich fut mouvementée, achats et rachats se succèdent, menace de démantèlement puis mise en sommeil peu après son acquisition par Whyte and Mackay, enfin après plusieurs années de difficiles tractations avec Fortune Brands, Mark Reynier et ses associés de chez Murray McDavid, Simon Coughlin Gordon Wright et Andrew Gray, réalise son rêve en 2001 en prenant le pari de l’indépendance de l’originalité et de la qualité.

Depuis, profusion d’assemblages d’ages et de styles différents, infinies variations sur les finitions, bousculant la tradition de whiskies sages et non tourbés, Jim n’en finit pas de nous étonner. Alchimiste passionné de nouvelles gammes, il manie saveurs et arômes pour susciter nos émotions. Mais Mark Reynier, Jim et leurs associés restent soucieux de maintenir la tradition en conservant cuve de brassage à ciel ouvert, cuves de fermentation en pin d’Orégon, safe, spirit still présents depuis la création de la distillerie en 1881, et la typicité de leur terroir au travers des apports de son sol, de ses sources et de son climat.

Ivehor Brown disait… Lentement savouré et non ingurgité d’un trait, le whisky peut être une boisson méditative et philosophique.
C’est sans doute dans cette part de rêve que s’inscrit la démarche de Bruichladdich.

Slainte !

Gérard TRENTESAUX